Château de Valprivas






La première mention du château de Valprivas remonte à 935 où il est nommé « oppidum et castellum » dans le Valle privata donnant naissance à la Bloue, ru qui rejoint l’Ance, rivière qui se jette dans la Loire en amont de Bas en Basset.

Le plus ancien titre connu sur Valprivas remonte à 1341. Bâti au XIVème siècle, le château subit des transformations au XVIème siècle. L'édifice se présente comme une forteresse médiévale transformée par des propriétaires éclairés qui l'ont doté, à l'extérieur, d'un décor Renaissance soigné. Décor peint de la chapelle réalisé au début du XVIIème siècle. Une campagne de percement des baies fut entreprise au XVIIIème siècle. Construit à l'origine sur un plan carré et flanqué sur les angles nord-ouest et sud-ouest de deux tours rondes, le château fut privé, en 1793, de son angle sud-ouest avec sa tour.

Le corps de bâtiment principal et ses deux ailes en retour entourent une cour intérieure fermée par un portail. A l'intérieur, la chapelle, située au rez-de-chaussée, reconsacrée en 1493 se compose d'une courte nef voûtée d'ogive, séparée du chœur par un mur d'appui surmonté de claustra. Le chœur est orné, sur ses murs nord et Est, de peintures murales figurant l'Enfer et la Résurrection. Peintures à l'huile sur mortier de chaux, commandées vers 1632. Les artistes seraient flamands, de seconde école lyonnaise, contemporaine de la seconde école de Fontainebleau. La partie Renaissance est demeurée pratiquement intacte. La chapelle et les peintures sont classées monuments historiques.


 

Histoire

 

Première période : Famille VERD (? – 1393)

Armes : « d'argent au lion de Sinople armé et lampassé de gueules »

Le château actuel a été édifié par la famille des VERD, famille chevaleresque dont la trace remonte à Falcon VERD (+1214) seigneur d’Urfé, Laval, St Bonnet et Valprivas mentionné dans un acte de 1194. Cette Maison de St Bonnet-leChâteau a fourni un archevêque de Reims au XIIème siècle, d’importants prélats et plusieurs baillis du Forez du XIIIème au XVème siècle. Il est impossible de déterminer précisément l'époque où cette famille devint maîtresse de Valprivas mais elle fut le plus probablement la première à posséder le lieu tel que nous le trouvons actuellement dont la construction

remonte le plus vraisemblablement au XIVème siècle.

C’est Bertrand, le troisième fils de Guichard VERD, fils de Falcon II qui est la tige des seigneurs de Valprivas au XIIIème siècle.

Pons VERD, seigneur de Valprivas et de Condrieu maria sa fille en 1372 à Jean de Thélys qui testa en 1393 et mourut sans postérité; les armes des Verd étaient « d’argent au lion de sinople armé et lampassé de gueules » et leurs devises étaient « Peur ne mal et « cognoscitur ungue leo » (on reconnait le lion à ses griffes).

 

Seconde période : Famille de Thélys (1393 – 1576)

Armes : « de gueules à trois fasces d’or »


 

Jean III de Thélys appartenait à une famille du Beaujolais remontant à Hugues de Thélys, seigneur de Lay (1260) dont la filiation remontait aussi à Falcon II Verd seigneur de Foris (Feurs) fils de Falcon I susmentionné.

Cette branche de la Famille de Thélys a donné naissance à Jean II de Thélys, gouverneur du Beaujolais et c’est le fils aîné de ce dernier Jean III (1360-1430, chevalier, qui épouse Agnès Verd, fille de Pons Verd; celui-ci avoua Valprivas au duc-comte de Forez en 1393.

Son fils Jean IV (+1441) mourut sans postérité et tout l’héritage passa aux oncles de Jean, seigneurs de l’Espinasse et du Sou, puis à ses fils Antoine, Josserand et Gauthier qui avouèrent Valprivas au duc -comte de Forez en 1459.

Josserand de Thelys est toujours seigneur de Valprivas en 1490. Notons que c’est en 1493 que la chapelle du château, dédiée à Ste Agathe, fut consacrée par Philippe de la Filhe, évêque d’Autun.

Antoine de Thélys , probablement un des fils de Josserand, avoua Valprivas à la duchesse Suzanne en 1506 . Son mariage avec Jeanne de St Romain lui apporte la seigneurie de Valorges et c’est cette dernière, Dame de Valorges en tant que douairière qui avoua Valprivas au Roi en 1541.

Louis de Thelys , son fils épouse en seconde noces Louise de Bonnaz et donne naissance à Jean de Thélys

Jean V de Thélys, petit fils d’Antoine, une fois son aïeule décédée, rendit hommage au Roi pour ce fief le 7 septembre 1557 et prit le nom de Jean de St Romain. Il compromit par ses violences sa fortune heureusement accrue et c’est lui qui probablement vendit le château de Valprivas à Antoine du Verdier vers 1576.

 


 

Troisième période : Famille du Verdier (1576-1706)


 

Armes : « d'azur à 3 pals d'argent, celui du milieu chargé de 3 alias 4 mouchetures d'hermine au chef de 3 étoiles » devise « Et Marti et Minervae »

                                                                                                                        

Antoine du Verdier (1544-1600) était le petit fils de Jean du Verdier, seigneur de La Mure et originaire de St Bonnet-le-Château, il fit des études brillantes et accompagna le cardinal du Bellay à Rome en 1560, visita l’Italie longuement et y apprit la langue et la littérature dont il éditera des traductions par la suite.

A son retour, en 1563 il s’engagea dans la compagnie de Guillaume de Gardanne, sénéchal de Lyon et adopta une seconde devise « Et Marti et Minervae » montrant, selon son ami Chapuis « que vous tenez les lettres en mémoire et que du dieu guerrier vous ne craignez les dards », et ce jusque environ 1570.

Il fut contrôleur général des finances dans la généralité de Lyon en 1580; Il prit le parti du Roi contre la Ligue et vit son château de Valprivas bombardé, pris et saccagé en 1591 par les soldats du seigneur de St Priest la veille des Rameaux. Lui-même fut prisonnier à Feurs par des bandes nemouristes . Il ne cessa de prendre le parti du Roi contre la Ligue et Henri IV se l’attacha comme gentilhomme de la Cour.

Il est compté comme parmi les hommes de lettres du XVIème siècle principalement pour sa « Bibliothèque françoise » anthologie de la littérature française jusque sa parution à Lyon en 1585. Un autre ouvrage la Prosopographie décrit les personnages célèbres depuis la nuit des temps et fut imprimé en 1573.

Il possédait une certaine fortune de par sa famille, sa position de magistrat et aussi par ses activités lucratives dans l’édition à Lyon, centre des plus actifs dans ce domaine dans toute l’Europe.

C'est lui qui fit transformer le château féodal de Valprivas en une demeure confortable avec des éléments architecturaux de son époque et avait fait aménager une importante bibliothèque dans l’aile Sud du château. Il mourut subitement à Duerne en 1600.


 

Claude du Verdier (1565-1649) seigneur de Valprivas et de Luriecq fut un homme de lettres sans envergure; fit imprimer quelques pièces de poésie en 1583.


                                                                                                              

Il fit ériger les peintures de la chapelle vers 1620, Ces œuvres, rares en Auvergne sont le fait d’artistes appartenant à l'école du Primatice et de Fontainebleau à la suite de Pierre Paul Rubens. Elles représentent la résurrection des morts et les tourments de l'enfer. Antoine du Verdier et son fils Claude ainsi que leurs épouses y sont représentés en tant que donateurs.

Il prit le nom de Verd du Verdier , abandonna le blason de sa famille pour reprendre celui de la famille chevaleresque des Verd ainsi que leur devise qui apparait au-dessus de l’entrée principale du château dans la cour d’honneur sa devise était D’or au lion de sinople lampassé et couronné de gueules Il fit hommage pour Valprivas et Luriecq au Roi en 1614.

Peintures murales ornant les murs de la chapelle

La Résurrection

  L’Enfer

Détails de la Résurrection

Détails de l’Enfer

Gaspard Beatrix Verd du Verdier fils du précédent devint seigneur de Valprivas.

Le 18 février 1665 le château fut Incendié en « haut estage ». Gaspar Beatrix fit hommage pour Valprivas, Luriecq et la Pompée en 1674. Il fut attaqué pour usurpation de noblesse en 1668 devant Du Gué, intendant de Lyon.

Claude Amédée Verd du Verdier, fils du précédent seigneur de Valprivas et Luriecq, épousa Anne de la Pierre de Saint Hilaire et mourut en 1706. Sa veuve prêta hommage en 1722. Ses 5 enfants moururent sans postérité et le château rentra dans la famille des La Pierre de St Hilaire en 1737.

 


 

 

4ème période : Famille de La Pierre de St Hilaire (1706-1794)

Armes : « de sinople à bande bretessée et contre bretessés d'argent accostée de deux lions de même lampassés et couronnés de gueules, l’un en chef, l’autre en pointe » supportées par deux lévriers.

Cette famille est originaire de Saint Bonnet-le-château où Aimé de la Pierre de St Hilaire était notaire à la fin du XIVème siècle; Les St Hilaire ont été alliés aux du Verdier du Puy au début du XVIIème siècle par le mariage de Clauda Verdier avec Benoît de La Pierre de St Hilaire.

 

C’est à François de la Pierre de St Hilaire, (1642-1712) fils de Claude André avocat au parlement et échevin de Montbrison, frère de Anne à qui échut la seigneurie de Valprivas à la mort de sa sœur, épouse de Claude Amédée du Verdier sans descendance en 1706.


 

Jean Baptiste de la Pierre de St Hilaire (vers 1700-1754) fils du précédent, secrétaire du Roi et seigneur de Valprivas transmit la seigneurie à son fils


 

Antoine Joseph de la Pierre de St Hilaire seigneur de Valprivas, de Soleillant et de Villeroy (1726-1794) rendit hommage au Roi en avril 1775. C’est lui qui réaménagea l’aile Sud du château en 1773. Il fut fusillé à Feurs en 1794 ainsi que 27 autres martyrs aux ordres du conventionnel Claude Javogues pour avoir fourni son château de Soleillant pour tenir le corps de garde sur la route de st Anthème à Montbrison, lors de la révolte de Lyon; entre autres chefs d’accusation il était invoqué qu’il était noble, riche et que ses fils avaient émigré. Une cause moins officielle a aussi été évoquée, il avait un temps refusé sa fille au conventionnel qui résidait à Montbrison dans la même rue.


 

Christophe de la Pierre de St Hilaire (1767-1804), fils d’Antoine avait émigré lors de la Terreur et ses biens furent confisqués et vendus en biens nationaux.

                                       

 

 


 


 

Cinquième période : maison d'éducation des sœurs de St Joseph du Puy (1794-1962)


 


 

Le château, confisqué et vendu comme bien national fut divisé.

L’abbé Laignel, chapelain, curé de Bas en Basset racheta l’aile nord en secondes mains et dès 1806 revendit ce qu’il avait acquis aux sœurs Jeanne Marie et Marguerite Demore, denteleuses à Valprivas et à Marie Cheuclin qui créèrent une maison d’éducation pour jeunes filles. L’abbé Antoine Deleage, successeur de l’abbé Laignel, rachetait en 1817 une maison attenante au château et la remettait aux sœurs Demore et Marguerite Farissier trois ans après; puis celles-ci rentrèrent au sein de la communauté de St Joseph du Puy qui ne tarda pas à acquérir le reste du château. La congrégation était déjà présente à Valprivas depuis le siècle précédent. Les sœurs dirigèrent la maison d’éducation et un pensionnat pour jeunes filles, enseignant aussi la couture et la dentelle. Quelques anciens de Valprivas y ont été scolarisés et se souviennent de cette école.

La chapelle castrale furent classée Monument historique en 1947 puis le château lui-même à l'inventaire supplémentaire, mais la quasi absence d’entretien pendant 150 ans en avait fait une ruine qui fut rachetée par Mademoiselle Salomé en 1962.

                                  
 

 

 


 


 

Sixième période : Le Centre Culturel de Valprivas (1962- 2010)


 

 

Mademoiselle Hélène Salomé pianiste de haut niveau ainsi que l’abbé Carl de Nys, musicologue renommé, ont été séduits par les lieux et ont œuvré à la remise en état de la bâtisse, ce qui a nécessité de très lourds travaux de sauvetage et de réaménagement.

Nombre planchers et parties de toiture avaient disparu, les peintures avaient été mutilées par des repeints pudiques ou badigeonnées pendant l’occupation des lieux par la congrégation religieuse. Tout a été repris avec l’aide des services culturels de la région.

 

L’abbé Carl de Nys et Mademoiselle Hélène Salomé ont créé un Centre Culturel et une école de musique sous forme d'association régie par la Loi de 1901. Les étages du château ont été aménagés en chambres pouvant recevoir stagiaires et concertistes, une grande salle de concert a été somptueusement aménagée; de nombreux concerts et enregistrements y ont été réalisés; quant à la cour d'honneur elle a fait l'objet de représentations théâtrales.

Les activités du Centre Culturel ont été affectées successivement par les disparitions de l’abbé Carl de Nys en 1997 puis d’Hélène Salomé en 2006. Sa sœur, Brigitte Adam, et son mari Jean Pierre ont poursuivi l’activité jusqu’en 2010, date à laquelle l’association fut dissoute.

L’abbé Carl de Nys

La salle de concert

 

 

Septième période : Otium* a Valprivas (2015- )

 

 

Les nouveaux propriétaires achetèrent le château en 2015. Des travaux de mise aux normes et d’aménagement sont en cours de réalisation dans le but d’en faire un lieu consacré à l’otium* dans la continuité des activités passées. Ils ont repris pour partie la devise d’Antoine du Verdier :

 

« Pour Mars et Minerve, la Culture est un Combat. »

 

Des résidences d’artistes, de poètes, d’intellectuels sont organisées à titre privé et philanthropique.

Pour toute information sur les activités, contacter les propriétaires par l’intermédiaire du site internet : www.chateaudevalprivas.com

La chapelle reste accessible aux habitants de la commune pour la messe de la sainte Agathe, sa patronne, le 5 février.

 

*L’Otium est un terme latin qui définissait sous l’empire Romain le temps libre par opposition au Negotium, et qui évoque des activités valorisant le développement intellectuel et artistique.



Un grand merci à Mme Brigitte Adam, Mr Jean-Claude Thiolière, Mr Pierre Dufétel, pour toutes les recherches, les belles photos et la rédaction de cette article.